« Je n'ai pas fini Nioh ». Quand on aime profondément les jeux vidéo ou qu'on les teste professionnellement depuis près de dix-huit ans, c'est à la fois une immense frustration et un constat d'échec.
La difficulté n'a pourtant jamais été un rempart inébranlable. Des jeux tels que Dark Souls, Bloodborne ou même Ninja Gaiden Black ont cédé sous la pratique. Mais Nioh résiste, tel un enfant insolant avec un sourire diabolique en coin... il faut dire que ses parents n'y sont pas allés de main morte.
Né sous X, Y et Z
La première chose que l'on constate en jouant à Nioh depuis la version bêta, c'est qu'il n'est plus simplement apparenté à Dark Souls avec un habillage emprunté à Onimusha, la star de Capcom des années PlayStation 2. Il est surtout très proche de son aîné Ninja Gaiden (autre série phare du studio Team Ninja).
Il ne s'agit donc plus d'évoluer dans un seul grand niveau spacieux, mais dans plusieurs décors différents, avec des voyages à la clé en bateau pour traverser le Japon féodal en long, en large et en travers.
Sur les différentes cartes s'affichent une mission principale, mais aussi des missions secondaires (utiles pour atteindre le niveau conseillé de la quête principale) et deux missions crépuscules aléatoires à tenter bien plus tard.
Mais pas d'inquiétude, vous pouvez revenir sur les précédents lieux visités pour retenter votre chance, certaines quêtes réclamant le niveau 100 alors que vous êtes à peine 35 à ce moment là de l'aventure.
Nioh Gaiden
Du grand frère, Nioh a aussi récupéré sa nervosité et son action évolutive. Le héros William a donc le choix des armes au début (il se spécialise dans deux branches sur cinq), et doit distribuer ses points de talent pour débloquer d'autres techniques de combat.
Au katana par exemple, une simple garde peut ensuite se transformer en contre, avec roulade au-dessus de l'ennemi suivi d'un coup d'estoc pour l'assommer. Et les techniques varient ensuite selon sa position de combat : haute pour les attaques lentes et puissantes, basse pour du mouvement plus rapide mais des coups faibles, et moyenne pour quelque chose de plus équilibré.
Et la Team Ninja a pioché du côté des arts martiaux japonais, et bien évidemment du kenjutsu (l'art des samouraïs), pour créer les mouvements d'attaque et de défense.
Bref, avant même d'étudier les techniques de l'adversaire pour espérer survivre un minimum, vous allez déjà devoir maîtriser vos innombrables possibilités pour pouvoir tirer parti au mieux de votre héros.
Et c'est pas fini !
Mais le studio ne s'arrête pas là et inclut tout un système de craft.
William doit apprendre l'art ninja pour se fabriquer des shurikens ou des étoiles jetées au sol pour ralentir l'ennemi. Il doit aussi manier la magie pour se créer des talismans. Et doit choisir un esprit protecteur (parmi trois au début, et bien plus par la suite) qui déterminera sa spécialité lorsque vous activerez votre jauge spéciale qui vous rend invincible quelques secondes.
Enfin, il doit distribuer ses points de talent dans différentes branches, mais aussi utiliser ses points de prestige pour améliorer certains attributs, à la manière des défis dans Borderlands 2. Tuer X ennemis au sabre vous donnera un point pour booster votre chance de loots, le pourcentage d'amrita obtenu (les âmes récupérés sur l'ennemi pour augmenter de niveau), ou encore la résistance au royaume des yokais (les ennemis du jeu).
Le revers évident
La générosité est une chose, mais elle se doit d'être un minimum maîtrisée. Et parfois, on se demande si Nioh n'en fait pas trop.
La gestion des amritas, des points de talent et de prestige, le craft, le ninjutsu, la magie, les cent loots par heure comme s'il s'agissait d'un hack'n slash. Au bout d'un moment, le joueur se lasse et ne fait plus attention à ce qu'il ramasse, mais il le fait pour pouvoir revendre et booster son équipement.
Il comprend de toute manière, que même avec un équipement amélioré d'un point par-ci, par-là, le sentiment d'impuissance à chaque nouveau niveau visité se ressentira quand même. Surtout que le jeu est long. Le studio évoquait les cent heures de jeu à l'époque, nous pouffions bêtement, mais cette durée estimée ne semble pas si loin de la vérité.
Je t'aime moi non plus
Nioh est un jeu que vous allez détester, mais que vous allez adorer détester pour son challenge, son solo, mais aussi sa coopération.
C'est un jeu généreux (parfois trop), très beau (parfois moins), difficile (tout le temps) et éreintant. Son histoire est évidemment mauvaise, la Team Ninja n'a jamais su narrer ses jeux, mais son ambiance est fantastique et les hurlements de joie à chaque victoire de boss valent bien les heures perdues à se remettre en question, à abandonner, pour mieux y revenir après une nuit de sommeil.
Vous ne verrez sans doute jamais son générique de fin. Les chasseurs de trophée vont évidemment détruire leur pourcentage de complétion et pleurer le Platine. Nous ne l'avons encore pas fini, épuisé par les innombrables morts et les niveaux de plus en plus difficiles, et nous devrions le haïr pour cet affront, mais malgré tout, nous sommes fiers de l'avoir dans notre PS4.
Car Nioh est une boite de Pandore que l'on ouvre dès qu'on a le sentiment que « le jeu vidéo est trop simple aujourd'hui ». Car c'est faux, il n'a jamais été aussi dur ! Et sa difficulté n'est pas un défaut, c'est une leçon : jouer nécessite aussi des efforts et de l'investissement.